Vendredi 18 septembre 1914 - Loivre

Journée de merde !!!..

C'est tombé sans discontinuer: la pluie, les obus, les hommes. Je suis trempé jusqu'aux os. Je grelotte. J'en ai marre. Je suis, encore et toujours, épuisé. La maison qui servait de PC a été écrasée par un obus. Le sous-lieutenant Deconihout, porte-drapeau du régiment, a été tué. Avec lui, une partie de sa garde. Encore des gars de ma compagnie. Pour reprendre mes réflexions d'hier, ça aurait de nouveau pu être moi.

La journée s'est poursuivie comme si de rien n'était. Ecrasée sous les obus. Tenir coûte que coûte, encore. C'était intenable. Insupportable. Le bruit des explosions, le sol qui vibre à chaque impact. Le bruit des maisons qui s'effondrent. Les cris des blessés.

Et, à 19h30, est arrivé un ordre de repli. Le soulagement pour tout le monde. On va quitter cet enfer. Pour retrouver quoi, je n'en sais rien. Mais n'importe quoi plutôt que cet acharnement, que ce martèlement incessant, que cette oppression. La pluie redouble. J'ai le visage trempé. La pluie? Des larmes? Je suis tellement heureux de sortir de là. Et en même temps, tellement triste d'abandonner ceux qui n'ont pas eu cette chance.

Départ à 22h30. Faudrait que je mange. Pas le goût.